Séminaire, TVES - Retour sur l'intervention du chercheur invité Jean-Philippe DE VISSCHER
Séminaire
Jean-Philippe De Visscher, professeur à l’UCLouvain, était chercheur invité du laboratoire TVES et de l'Université de Lille. Dans le cadre d'un séminaire, il a présenté d’une part, des études de cas mettant en évidence les limites de l’action publique et la nécessité de développer des pratiques fondées sur le principe des « communs urbains ». D’autre part, ces études ont permis d’illustrer pourquoi et comment concevoir des objets, des lieux et des processus favorisant l’expérimentation collective et soutenant une transition de l’action publique vers l’action commune.
Retrouvez ci-après la synthèse de cette rencontre.
Synthèse du séminaire
Parcours et fil conducteur
Jean‑Philippe De Visscher part de son expérience d’architecte et des frustrations liées à la pratique de projet « classique » pour se tourner vers la recherche en urbanisme et le contact direct avec les usages réels des espaces. Il met en avant l’importance d’apprendre des situations concrètes (déchets, inondations, mobilité, cohabitation de campus) plutôt que de rester dans une logique purement descendante. Il articule ainsi des cas concrets (Cameroun, Belgique, Kinshasa, villes africaines) avec une réflexion théorique sur les limites de l’action publique classique et la nécessité de nouveaux modèles de gouvernance partagée.
Théorie des communs urbains
Son cadre théorique repose sur trois pôles interdépendants : un espace commun, une communauté associée et un modèle de gouvernance adapté. Il insiste sur la différence entre biens publics (gérés par l’État) et biens communs (autogérés), en rappelant que les communs urbains ne préexistent pas mais se construisent par des processus et des pratiques collectives.
Études de cas environnementales
Les projets au Cameroun et en Belgique lui servent à montrer comment partir de problèmes « trop grands » (inondations, gestion foncière) peut bloquer l’action, alors que la focalisation sur un enjeu concret et modeste (grilles pour déchets plastiques, équipements de filet, cartographie de « vallons secs ») ouvre la voie à la co‑gestion locale. Ces démarches mettent en lumière l’importance d’identifier la bonne échelle d’action et d’ancrer la participation dans des dispositifs matériels simples.
Dispositifs collaboratifs et urbanisme
Les projets de sentier entre universités, de piétonnier à Bruxelles ou de réaménagement d’axe historique illustrent une manière de « hacker » les institutions via des outils concrets : grandes cartes collaboratives, maquettes de salle de réunion, task forces inter‑administratives. Lorsque le blocage politique survient, l’équipe réoriente le travail vers la qualité de l’espace public (rues d’été, abords d’écoles) plutôt que la seule mobilité, ce qui permet de maintenir une dynamique de transformation.
Méthodologie participative et expérimentalisme
La méthodologie de recherche participative repose sur des enquêtes de terrain, des maquettes interactives et des objets manipulables qui facilitent le débat, créent de la confiance et permettent de reformuler des plans (par exemple, transformer un plan de mobilité en plan pour l’espace public). L’expérimentalisme consiste à accepter que les processus de participation soient pragmatiques, évolutifs et souvent révélés lors de moments de crise, tout en cherchant à dépasser le caractère ponctuel de ces expériences.
Gestion collective et villes africaines
Enfin, les exemples africains (puits dans une ravine devenu espace public à Kinshasa, systèmes de mobilité gérés localement) montrent comment des actions communautaires peuvent se transformer en dispositifs durables de gestion des problèmes publics. Jean-Philippe De Visscher souligne que, face aux limites des plans de mobilité et des capacités publiques, ce sont les chefs de quartier, organisations locales et collectifs qui assurent le fonctionnement quotidien des villes, ce qui plaide pour des modèles intermédiaires de gouvernance urbaine fondés sur les communs.